58 défenseuses des droits humains. 30 pays. 9 régions.
Mené à bout de dévouement, d’engagement et de passion, le combat des défenseuses des droits humains en faveur des droits, du genre et de la justice sociale a entraîné des changements dans bon nombre des communautés où il s’est implanté. L’Hommage en ligne 2015 de l’AWID aux défenseuses qui ne sont plus parmi nous célèbre la mémoire de femmes issues de différents horizons, notamment d’activistes, de femmes politiques, de pacifistes, d’auteures, d’artistes, d’avocates, de chercheuses et de journalistes. Ces défenseuses ont plaidé et œuvré en faveur des droits des femmes, des travailleurs-euses, des peuples autochtones, des personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et trans*, (LGBT), de la protection des terres, des droits environnementaux et des travailleurs et travailleuses du sexe; elles ont cherché à atteindre la justice légale et sociale et mené des campagnes pour le droit à l’éducation. Leur activisme témoigne des luttes collectives menées par tous nos mouvements sociaux. Cet hommage célèbre le souvenir des défenseuses des droits humains qui ne sont plus parmi nous et salue leur travail.
« J’éprouve beaucoup de compassion pour toutes ces femmes qui ont été si fortes, pour ces vies poursuivant avec détermination le but de faire respecter les droits humains. Je me sens proche et intégrée au mouvement féministe dans toute son ampleur ainsi qu’aux mouvements des droits des femmes, où toutes nos contributions et nos existences sont précieuses et valorisées. » – Rona Donefer, l’AWID
L’AWID, qui a lancé cet hommage pour la première fois lors du 12ème Forum international de l’AWID sur les droits des femmes dans le développement à Istanbul, en Turquie, le renouvelle et l’actualise chaque année en contribution aux 16 Jours d’activisme contre la violence basée sur le genre (du 25 novembre au 10 décembre 2015). Durant cette période de campagne, l’hommage vise aussi à élever les consciences quant aux dangers qu’affrontent constamment les défenseuses des droits humains ; et met l’accent sur la nécessité de politiser et soutenir le souci de soi, un renforcement de la protection et de la sécurité pour les défenseuses.
Si nombre des défenseuses que nous mettons à l’honneur sont décédées des suites d’accidents, de maladies ou de vieillesse, plus de 50% de celles auxquelles nous rendons hommage cette année ont été tuées ou « disparues » comme conséquence directe de leur activisme, dont 14 pour la seule année 2015. Ces chiffres témoignent des niveaux de violence et de discrimination auxquels les défenseuses des droits humains se trouvent confrontées de par le monde. Les défenseuses protègent des droits auxquels toute personne a le même droit ; mais dans le monde entier, le travail de protection et de défense des droits de personnes et de groupes particulièrement marginalisés s’avère de plus en plus dangereux. Bien que la région de l’Amérique latine et les Caraïbes ait été au premier plan de la défense des droits LGBT au niveau mondial, avec par exemple des pays comme l’Argentine qui prend des mesures pour promouvoir ces droits (en anglais), les défenseuses telles que Diana Sacayán (Argentine), Bárbara Lezama (Mexique) et Francela Mendez (Le Salvador) ont toutes été tuées pour ce qu’elles étaient et le travail qu’elles faisaient. De la même façon, en l’Afrique subsaharienne, Fannyann Viola Eddy de Sierra Leone, une dirigeante du mouvement africain pour les droits des gays et Vuyisa Dayisi, une jeune femme transgenre d’Afrique du Sud, sont décédées des suites de cette violence homophobe qui prolifère dans de nombreux pays de la région. Malgré une constitution interdisant la discrimination basée sur l’orientation sexuelle, les droits des personnes LGBT sont souvent violés en Afrique du Sud. Et, souvent, en fonction des contextes juridiques et sociaux, la violence que doivent affronter les activistes LGBT à travers le monde est un mélange de lois anti-homosexualité draconiennes et/ou d’attitudes extrêmement discriminatoires dans ces sociétés.
Les défenseuses des droits humains qui avaient réclamé justice devant la loi et la société ont elles aussi été ciblées ; c’est le cas des avocates Joan Kagezi (Ouganda) et Samira Saleh Al-Naimi (Irak), ainsi que de l’activiste sociale Isabel Ayala Nava (Mexique) et sa sœur Reyna, qui ont toutes été assassinées. La quête de la justice et de la vérité est une part importante du travail que de nombreuses défenseuses ont mené, enquêtant, révélant et dénonçant la corruption du gouvernement et les activités des groupes criminels et des cartels de la drogue. Dans la région de l’Amérique latine et les Caraïbes, en particulier, six journalistes parmi les défenseuses des droits humains mises à l’honneur dans cet hommage ont été tuées, comme c’est le cas de Naseeb Miloud Karfana, une journaliste libyenne.
Au Moyen-Orient et en l’Afrique du Nord, des femmes politiques œuvrant à promouvoir les droits des femmes et le droit à l’éducation, ainsi que des défenseuses des droits humains telles que Shaimaa El-Shabbagh (Égypte) ont toutes perdu la vie en conséquence de leur activisme. Les défenseuses que nous célébrons dans notre hommage sont nombreuses à avoir subi le même sort.
Certaines de ces femmes mises en avant ici ont soutenu l’AWID et travaillé avec nous au fil des années. Parmi elles, Vivian Stromberg (États-Unis) et Josefa ‘Gigi’ Francisco (Philippines). D’autres, comme Sabeen Mahmud (Pakistan), Losana McGowan (Fidji) et Jelena Šantić (Serbie), que nous avons l’impression d’avoir connues – comme c’est le cas de toutes les autres défenseuses des droits humains mises à l’honneur – ont transmis des valeurs de respect, de communauté et de paix que nous partageons. Nous espérons également que cet hommage nous rappelle que l’héritage et les conceptions légués par ces femmes inspirantes est une part considérable de nos voix collectives disant :
« La lutte contre un problème unique n’existe pas car nous ne vivons pas des vies à problème unique » -Audre Lorde
L’AWID souhaiterait remercier les familles, les ami-e-s et les organisations qui ont fait part de leurs histoires individuelles et ont contribué à ce mémorial. Nous nous joignons à présent à elles pour poursuivre le travail remarquable de ces femmes et consolider les efforts pour garantir que justice soit rendue dans les cas qui demeurent impunis.