L’Association pour les droits de la femme et le développement (AWID) condamne fermement les tentatives à répétition – il s’agit ici de la troisième – de soumettre la loi anti-homosexualité au Parlement ougandais. Nous sommes solidaires du peuple ougandais, qui appelle son gouvernement à retirer, une fois pour toutes, cette proposition de loi, et à respecter les droits humains de toutes les personnes.
La dernière présentation de la proposition de loi a eu lieu le 21 novembre 2012. Celle-ci pourrait donc être débattue et adoptée avant la mi-décembre 2012. Si elle est promulguée, cette loi représentera une grave menace aux droits humains de l’ensemble de la population ougandaise et rendra légale la discrimination contre les personnes qui sont ou sont suspectées d’être homosexuelles, lesbiennes, bisexuelles ou transgenres. D’autre part, les tentatives à répétition de faire passer cette loi contribuent à un climat de stigmatisation, de discrimination et de violence intenses envers la communauté LGBTI ainsi que leurs familles, amis et sympathisants.
Nous exprimons notre solidarité à la communauté LGBTI ougandaise et à l’immense opposition panafricaine à la loi contre l’homosexualité, y compris des organisations africaines LGBTI, féministes, des droits des femmes et des droits humains, des secteurs liés au VIH et au SIDA et de dirigeants religieux. En notre qualité d’organisation des droits des femmes dirigée par et constituée par une majorité de membres de l’hémisphère Sud, nous notons également que la lutte pour les droits humains pour tous, y compris les personnes LGBTI, est universelle. Au cours des vingt dernières années, les pays du Sud, tels que le Brésil, l’Inde et l’Afrique du Sud, ont tous adopté des mesures pour mettre en œuvre des réformes en matière juridique et de politique visant à appuyer et respecter les droits des personnes LGBTI. Nous encourageons l’Ouganda à s’engager sur cette voie et à prendre des mesures positives en rejetant la proposition de loi et en assurant le respect des droits humains de toutes les personnes.
La loi introduit des dispositions draconiennes venant s’ajouter à l’interdiction actuelle des relations entre partenaires consentants de même sexe. Certains rapports signalent que le Comité des affaires juridiques et parlementaires aurait supprimé la peine de mort qui figurait dans la version originale de la proposition de loi. Indépendamment de cette modification ou de tout autre changement introduit dans cette proposition de loi, nous la condamnons dans sa totalité, tout comme les mesures qui visent à criminaliser, stigmatiser, poursuivre et sanctionner les personnes du fait de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre.
Les recherches de l’AWID sur les fondamentalismes religieux démontrent clairement que peu importent les régions ou les religions : l’orientation sexuelle et l’identité de genre représentent en quelque sorte des paratonnerres, s’attirant les foudres des forces fondamentalistes. C’est le cas en Ouganda, où les personnes qui outrepassent les normes rigides établies par les fondamentalistes, sont perçues comme des menaces au tissu social, aux notions de « moralité » et de « famille » - autant de discours qu’adoptent fréquemment ces acteurs pour s’approprier le pouvoir. En fait, cette loi, qui prêche la protection de la famille, des enfants et des valeurs traditionnelles, ne fait que promouvoir la haine et la violence. Il ne s’agit pas du tout d’une question de valeurs culturelles : cette proposition de loi a été fortement influencée par les ressources et le discours haineux des groupes chrétiens de droite des États-Unis.
Non seulement ce projet viole-t-il plusieurs des protections garanties par la Constitution ougandaise, mais il contrevient également à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et à de nombreux autres traités internationaux sur les droits humains dont l’Ouganda est partie. Par surcroît, le projet de loi contredit l’appel énergique lancé en mars 2011 dans la Déclaration conjointe au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, signée par 84 États membres (y compris le Nigeria, la République centrafricaine, l’Afrique du Sud et le Rwanda), exhortant les États à prendre des mesures visant à mettre un terme aux actes de violence, aux sanctions pénales et aux violations connexes des droits humains fondés sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre.
L’AWID est solidaire des femmes et des hommes de l’Ouganda qui luttent pour les droits humains et la justice. Nous avons la conviction que le respect intégral des droits sexuels fait partie des droits humains garantis pour toutes les personnes. En conséquence, nous exhortons le gouvernement de l’Ouganda à retirer immédiatement la proposition de loi anti-homosexualité et à respecter l’universalité des droits humains.
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